7 choses que j’ai apprises pour prendre soin de ses freelances (et des cerveaux atypiques)
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Si tu ne dois retenir qu’un seul truc, retiens ça :
L’inclusion, c’est pas un bonus sympa à ajouter quand t’as le temps. C’est le socle invisible qui détermine si les gens brillent… ou s’éteignent à petit feu.
Voici ce que j’ai appris pendant ce premier panel à l’EBL 2025 :
Une charte culture, ce n’est pas un wallpaper Notion : c’est un engagement.
Le monde créatif est bourré de cerveaux atypiques — ce n’est pas l’exception, c’est la norme.
L’inclusion, c’est aussi créer un espace où il est safe de dire “je vais mal”.
Les freelances méritent d’être inclus·es à la table… même s’ils bossent à la mission.
Un bon projet c’est comme une relation saine : il faut apprendre à bien communiquer.
Ce qu’on appelle souvent “manque de pro” est parfois un manque d’informations.
Si tu veux bien bosser avec des atypiques… tu dois les aimer vraiment. Pas juste les tolérer.
Je vous plante le décor : un panel cash, inclusif, et sans paillettes inutiles
Intitulé “How to make freelancers feel more included?”, ce panel était une super entrée en matière.
Trois intervenant·es, trois visions complémentaires, et un point commun : l’authenticité.
Et franchement, ça fait toujours du bien.
✨ Judith Germain
Consultante et autrice de The Maverick Paradox, spécialisée en leadership inclusif.
Elle milite depuis des années pour des environnements pro où les “esprits non-conventionnels” peuvent être vus, entendus, et respectés.
✨ Rachel Morgan-Trimmer
Diagnostiquée autiste et TDAH à l’âge adulte, elle forme aujourd’hui des entreprises entières à la neuro-inclusion à travers Firebird.
✨ Af Malhotra
Entrepreneur et investisseur, il a une façon très lucide de parler du monde pro : les injonctions, la performance, le besoin de coller à des standards absurdes…
✨ Kristjan Byfield
Fondateur de The Depositary, agent immobilier militant pour une approche plus éthique et humaine du secteur.
Neurodivergent assumé, il plaide pour une reconnaissance sincère des différences cognitives dans tous les environnements professionnels, au-delà des simples cases ou diagnostics.
Ce que j’ai compris (et ce que j’en tire)
1. 🤝 L’inclusion commence avec une charte… mais une charte utile s’il vous plaît.
Créer une “culture charter” ne sert à rien si elle reste planquée dans un Notion que personne ne lit.
Il faut clarifier dès le départ :
les comportements attendus,
ceux à encourager activement,
et surtout, le pourquoi derrière chaque valeur.
👉 Une charte claire permet aux freelances de comprendre où ils mettent les pieds.
Et de s’y sentir légitimes — même s’ils ne bossent “que” en mission courte.
2. 🧠 La neurodiversité n’est pas une exception dans les métiers créatifs, c’est la norme.
Lorsque j’ai entendu ces quelques mots, j’ai ressenti un mélange de soulagement et de tristesse.
“The creative industry is full of neurodivergent people.”
Parce que oui, moi aussi je suis neurodivergente.
Oui, moi aussi j’ai été considérée brillante dans un domaine et complètement “à côté de la plaque” dans un autre.
Oui, j’ai dû masquer, adapter, compenser, pour qu’on m’écoute.
En y repensant, j’ai réalisé que mon parcours dans le milieu créatif — écriture, peinture, design — m’a souvent mise en contact avec des personnes aux profils atypiques. Et ce n’est pas un hasard.
Des études récentes montrent que la neurodiversité est particulièrement présente dans les industries créatives. Par exemple, un rapport de 2020 du projet Creative Differences d'Universal Music a révélé que jusqu'à 40 % des personnes dans le secteur créatif au Royaume-Uni s'identifient comme neurodivergentes, comparé à une estimation de 15 à 20 % dans la population générale.
Pourquoi une telle concentration ? Parce que les métiers créatifs offrent souvent un terrain fertile pour les esprits qui pensent différemment. Les personnes neurodivergentes apportent des qualités telles que la reconnaissance de motifs, la pensée latérale et une affinité pour l'identification de solutions novatrices, des atouts particulièrement précieux dans les rôles créatifs .
La neurodiversité n’est pas une anomalie dans les métiers créatifs — elle en est une composante essentielle.
👉 Envie d'explorer un peu plus le sujet ? Je te recommande ces deux articles.
3. 🧘♀️ L’espace de travail doit être un espace où dire “je ne comprends pas”, c’est OK.
“We need to give people the permission to be wrong, to make mistakes”
- Rachel Morgan-Trimmer
Pas besoin d’avoir un Slack “#mental-health” pour ça.
Mais chaque collaborateur·ice doit sentir qu’il peut :
ralentir sans se justifier,
poser ses limites sans être perçu comme “fragile”,
avouer qu’il ne sait pas ( encore ) faire quelque chose,
avouer une erreur,
dire “je suis pas au top aujourd’hui” sans flipper de perdre sa place.
👉 La sécurité psychologique, ce n’est pas un luxe. C’est le carburant de la créativité.
5. 🧒 L’école aurait pu être plus inclusive. Le monde pro le peut encore.
Une phrase, dans ce panel m’a particulièrement touchée :
“When it comes to presentations at school I was always so nervous and all yet at home I was already working on a few businesses so yeah had school been more inclusive I could have maybe strenghten my strength quicker.”
- Alex Partridge
Cette sensation de décalage constant, entre ce que je suis et ce qu’on attendait de moi.
Entre ce que j’avais envie d’explorer… et ce qu’on me disait d’apprendre.
Entre mes idées, mes envies, et les cases trop serrées dans lesquelles je ne rentrais jamais.
Et si t’as connu ça aussi, je veux juste te dire : tu n’es pas seul·e.
Quand on ne se sent pas à notre place dans un système censé nous préparer à la vie, on finit par croire qu’on n’a pas de place du tout. Qu’il faut “devenir quelqu’un d’autre” pour être pris au sérieux.
Mais aujourd’hui, on a la chance de pouvoir créer ou rejoindre des environnements différents. Plus souples. Plus humains. Plus respectueux des sensibilités et des singularités de chacun. Et même si le monde pro a encore un sacré chemin à faire, on peut, à notre échelle, bâtir une culture de travail plus inclusive. Ça demande du courage. De l'entourage. Et un vrai changement dans ton approche : celui de cesser de chercher à “rentrer dans le moule” pour plutôt affirmer qui on est et construire autour. Parce que soyons honnêtes : il y a encore un gouffre immense entre ce qu’on nous apprend à l’école et en études supérieures, et ce qu’on attend de nous dans la vraie vie.
À l’école, on nous forme à exécuter des consignes sous la menace qu’on nous confisque notre avenir potentiel. Pas à s’écouter. À explorer. À construire une vie qui a du sens pour soi. Et c’est normal, car il serait tout à fait impossible d’intégrer ces apprentissages personnels dans un modèle basé sur la généralisation, la normalisation, et la théorie.
Malheureusement l’épanouissement ne rentre pas dans une case. Et il ne peut donc pas être enseigné de manière scolaire et généralisée. Il se construit souvent dans les marges. À travers nos passions, nos expériences, nos tentatives et nos échecs, et à l’école parfois, mais aussi et surtout en dehors.
Alors non, il ne s’agit pas de dire que l’école ne sert à rien, ou d’agiter les noms de magnats du business qui ont “réussi sans le bac” comme si c’était LA voie ultime. Ce n’est pas une revanche qu’on cherche. Ce qui compte, c’est de rester concentré·e sur l’objectif final :
Comment, aujourd’hui, je peux me rapprocher un peu plus de la personne que je veux devenir et de la vie que je veux vivre.
Même si ce n’est qu’un petit pas.
Même si c’est juste 30 minutes de recherches le soir.
Même si c’est une conférence TEDx écoutée en faisant la vaisselle, ou un week-end pour essayer quelque chose qui nous attire depuis longtemps.
L’école ne sera pas un obstacle suffisant pour t’empêcher de trouver ta voie. Mais à l’inverse, ne laisse pas le fait d’en être sorti·e devenir un fardeau à porter et justifier sans cesse pendant 10 ans.
4. 🪞Entoure-toi de gens qui ressemblent aux personnes que tu veux aider
“Your team should reflect the people you’re trying to reach.”
Et c’est fou à quel point c’est évident… et ignoré.
Tu veux travailler avec des jeunes en galère pro ? Embauche ou collabore avec eux.
Tu veux accompagner des gens en reconversion ? Donne la parole à ceux qui l’ont vécue.
Tu veux comprendre les besoins d’un public marginalisé ? Invite-les à ta table de décision.
L’inclusion, ce n’est pas “faire une place symbolique”.
C’est laisser de la place, et écouter ce qu’on n’aurait jamais pu imaginer seul·e.
6. 💥 Tu veux bosser avec des profils atypiques ? Apprends à les aimer. Vraiment.
Pas juste les tolérer. Pas les utiliser pour respecter des quotas et “diversifier ton équipe”.
Les aimer pour ce qu’ils apportent de déstabilisant, de brillant, de… vivant.
Parce que bosser avec des cerveaux atypiques, c’est pas juste “cool” et “altruiste”.
C’est un pacte. Et il va dans les deux sens.
“I can teach you anything you want to know about neurodiversity, but I can’t teach you to care”
- Rachel Morgan-Trimmer
💡 Ce que les profils neuro-atypiques peuvent apporter :
(quand ils sont respectés, écoutés, et bien intégrés)
Des idées surprenantes et une pensée hors cadre
Une capacité à faire des liens invisibles aux autres
Une mémoire ultra-sélective mais redoutable
Une honnêteté brute (parfois désarmante, mais souvent salvatrice)
Une hyperconscience de l’ambiance et des signaux faibles
Une résistance aux normes, qui permet d’oser des chemins inattendus
Des zones d’expertise ultra pointues, creusées jusqu’à l’os
Une loyauté rare quand la confiance est là
Et souvent… un humour un peu spécial mais vraiment pas mal 👀
Mais attention, ces atouts ne sont pas gratuits.
⚠️ Ce qui vient aussi avec (et qu’il faut apprendre à considérer aussi) :
Une hypersensibilité aux environnements bruyants, chaotiques ou injustes
Des besoins de clarté (pas de double discours, pas de règles floues)
Un rapport au temps non conventionnel : hyperfocus ou inertie, sans “juste milieu”
Des mécanismes de défense comme l’isolement, l’ironie ou le shut down
Une difficulté à décoder les attentes implicites ou les jeux de pouvoir
Une énergie qui fluctue en dents de scie (avec des pics de génie… et des crashes)
Une franchise qui peut piquer si elle n’est pas recadrée avec bienveillance
Et parfois… des moments de bug complet sans raison apparente
Bref :
👉 Tu veux les brainstormings de génie ? Tu prends aussi les silences.
👉 Tu veux l’expertise hyper poussée ? Tu accepte aussi le manque d’intérêt complet pour d’autres aspects de ton corps de métier.
👉 Tu veux un coup de magie ? Tu acceptes qu’il ne se produit probablement pas en open space sous néons à 8h du matin.
Ces profils ne sont pas là pour te divertir avec du génie à la demande.
Ce sont des humains, pas des extensions de tes outils de gestion préférés.
Et si tu sais créer un cadre qui les respecte, tu ne vas pas juste "diversifier ton équipe", tu vas changer la manière dont elle pense, dont tu penses.
Pour de vrai.
7. 🌀 Non, l’entrepreneuriat n’est pas fait pour tout le monde. Et c’est très bien comme ça.
“I wouldn’t recommend entrepreneurship to everyone”
- Af Malhotra
Et moi non plus.
Parce que l’important, ce n’est pas de devenir entrepreneur.
C’est de trouver un espace où tu peux respirer, créer, contribuer à ta manière.
Certain·es s’épanouiront pleinement en freelance.
D’autres auront besoin du cadre rassurant du salariat.
D’autres encore danseront entre les deux.
Il n’y a pas de mauvais chemin. Il y a juste le tien.
❤️ Respect is the new ROI
Les freelances ne cherchent pas des babyfoots ou des stickers Slack.
Ils cherchent un endroit où leur contribution est valorisée, leur cerveau respecté, et leur rythme compris.
Et pour les profils neurodivergents ?
Ce respect-là, c’est souvent la différence entre “je m’épanouis” et “je m’éteins”.
“When people feel seen, safe, and respected — they give you their best work. It’s that simple.”
— Philippa White, Return on Humanity
Dans son livre, Philippa White parle de remettre l’humain au cœur des organisations, en prouvant que ce n’est pas juste un “nice to have”, mais un levier de transformation concret, stratégique… et rentable.
Elle appelle ça le ROH, soit Return on Humanity et c’est particulièrement vrai quand on bosse avec des profils atypiques.
Parce que les talents qui pensent autrement, ressentent autrement, agissent autrement… n’ont pas besoin d’être “corrigés”.
Ils ont besoin d’un cadre qui reconnaît que leur valeur ne se mesure pas au volume horaire, à la rapidité de réponse ou à leur capacité à “s’intégrer”.
👀 Tu veux de l’innovation, de l’engagement, de la fidélité ?
Commence par donner du respect, pour de vrai.
Le vrai ROI commence là.
🔁 Ce que j’aimerais que tu retiennes
Sois intentionnel·le dans la façon dont tu collabores avec les freelances : il ne s’agit pas juste de contrats, mais de personnes.
Prends la neurodiversité au sérieux, pas comme une tendance, mais comme une réalité humaine et professionnelle.
Ne laisse personne croire qu’il n’est pas fait pour “réussir” juste parce qu’il ne rentre pas dans les schémas classiques.
Rappelle-toi qu’un environnement de travail sain, ce n’est pas celui qui fonctionne pour tout le monde, mais celui qui permet à chacun·e de fonctionner à sa manière.
Tu veux créer un environnement où les freelances (et les atypiques) veulent revenir ?
Commence par leur montrer qu’ils ne sont pas juste un outil ou une performance.
Tu veux retrouver les autres deep dives de la série sur l’Elite Business Live 2025 ?
Je te les ai tous rassemblés ici : Elite Business Live 2025 : Ce que j’ai retenu (et pourquoi c’est peut-être pile ce qu’il te faut… ou pas du tout).